L’implantation de l’usine sidérurgique de Neuves-Maisons, à la fin du 19ème siècle, va profondément changer la structure sociale de Chaligny : d’une part, les viticulteurs dont la vie est rythmée par les saisons et les aléas du temps, et d’autre part, les ouvriers dont la vie est rythmée par les besoins de l’usine qui fonctionne jour et nuit, sept jours sur sept (les hauts-fourneaux ne peuvent pas être arrêtés).
Ce fractionnement de la société chalinéenne est concrétisé par l’habitat : maisons traditionnelles lorraines pour le Mont et le Val, et cités ouvrières au Val Fleurion et à Banvoie.
La venue d’une main-d’oeuvre ouvrière, originaire d’autres régions françaises et de pays étrangers, introduit de nouvelles habitudes dans la vie du village.
Une succession de mauvaises années pour la vigne et le partage des propriétés, vont inciter les jeunes générations à s’orienter vers l’industrie, afin de profiter d’un revenu fixe et des avantages sociaux offerts par l’usine de Neuves-Maisons.
L’arrivée du phylloxera accélère le déclin de la viticulture, tandis que l’expansion de la sidérurgie lorraine réclame de plus en plus de main d’oeuvre.
Au milieu du 20ème siècle, la population chalinéenne s’est adaptée, et a retrouvé son unité en intégrant les nouvelles contraintes dues à l’industrie.
Le paysage est également transformé avec les cheminées et les fumées de l’usine de Neuves-Maisons.
"... Jusqu’à la création des usines métallurgiques, les paysages lorrains étaient harmonieux et gais ; mais on a mis des fumées dans notre ciel, des cheminées dans nos plus beaux sites, des transporteurs aériens sur nos rivières, et des crassiers un peu partout.
... Allez à Longwy-Haut, le soir, vous aurez la sensation de l’enfer de Dante à l’heure des coulées majestueuses.
Vous y verrez une vallée d’incendie qui vous rappellera la Rome incendiée de Néron, lorsque les quinze hauts-fourneaux crachent leurs fontes en fusion et que les trains de laitier vont déverser leurs torrents de feu sur les crassiers.
La vision d’art change forcément, il s’ajoute une nouvelle note d’art intense, d’art vivant qui vient de la vie elle-même. La tradition ne disparaît pas, mais il s’ajoute une nouvelle tradition, un nouveau fleuron à la couronne. "C’est un fleuron de fer sur la couronne"
Ailleurs, la vallée de la Moselle à Richardménil et à Messein est suffisamment vaste et suffisamment belle pour supporter les fumées et la vie grouillante autour de Neuves-Maisons"
J.E. DELLUC - Le Pays Lorrain (1906) - Gallica
En mai 2003, huit anciens salariés d’Usinor et Unimétal, ayant été contaminés par l’amiante, font condamner la SAM Neuves-Maisons pour faute inexcusable. Ils sont soutenus par la FNATH (Fédération nationale des accidentés du travail et des handicapés).
L’avocate de la société fait appel, en arguant du fait que, d’une part, la SAM n’était pas propriétaire de l’usine au moment des faits, mais Usinor et Unimétal, et d’autre part, que les plaignants n’ont jamais été salariés par l’entreprise. Elle objecte que la responsabilité de la contamination incombe aux anciens propriétaires, et non au repreneur (SAM Neuves-Maisons) qui, par ses investissements, a permis d’éviter le dépôt de bilan.
En janvier 2005, la SAM Neuves-Maisons est définitivement condamnée par le Tribunal de Nancy dans la contamination par l’amiante des huit anciens salariés d’Usinor et d’Unimétal. L’indemnisation du préjudice est soumise à une expertise médicale. Actuellement, le cancer du mésothéliome induit par l’amiante provoque 3 000 décès par an.
